Marketing PGC

4 raisons pour lesquelles les MDD filent du mauvais coton

Il y a quelques mois encore, les spécialistes du marketing nous expliquaient que les marques avaient perdu leur attractivité face à des consommateurs de plus en plus infidèles et focalisés sur les prix. L’ascension des marques de distributeurs semblait alors inéluctable et certaines enseignes affichaient même en 2008 un objectif de 50% de part de marché de MDD dans leurs ventes.

1/ L’écart de prix avec les grandes marques s’est ratatiné

Aujourd’hui la guerre des prix est passée par là. La féroce bataille entre les enseignes pour s’afficher « le moins cher » s’est focalisée sur les produits emblématiques (Danette au chocolat, Prince de Lu, etc.). Les grandes marques ont du consentir à des baisses de prix drastiques et des promotions à tout-và. Leur prix moyen a baissé de 1,5% en 2015 et leur chiffre d’affaires réalisé en promotion (sur prospectus) a bondi de 11,2% selon Nielsen. A l’inverse, la baisse de prix n’a pas dépassé 0,2% pour les MDD et elles ont déserté les prospectus (-1,7% de chiffre d’affaires sous promotion). Or, les Français sont particulièrement avides de ces promotions : elles aiguillent 79% des consommateurs dans leurs achats.

Au fil des ans, l’écart de prix entre marques nationales et marques de distributeurs s’est considérablement resserré depuis 2012. Pour les produits « fond de rayon », la différence s’est réduite à 20% aujourd’hui, contre près de 40% en 2012. « Avec la multiplication des lots virtuels il devient même très fréquent de trouver la marque fabricant moins chère que la MDD », a même noté Nielsen. Un comble, pour des produits qui ont été conçus au départ pour offrir une alternative moins chère aux clients.

Malgré l’augmentation du nombre de références, la part de marché des MDD s’affaisse. Source : Nielsen

2/ Un « embourgeoisement » qui se répercute sur l’image de l’enseigne

C’est justement sur leur positionnement que les MDD se retrouvent dans le flou. Elles ont eu tendance à « s’embourgeoiser » ces dernières années, dans une sorte de course à l’innovation et à la sophistication. On a ainsi vu apparaître des snacking dignes de grands chefs (« sandwich de pain brioché au poulet curry et pousses d’épinard »), des gammes « terroir », Bio, Premium, ou même végétariennes. Et ce n’est pas fini, puisque les distributeurs affirment vouloir sortir de l’ornière par le haut. Carrefour a par exemple annoncé un partenariat avec Gault & Millau pour labelliser sa gamme Carrefour Sélection. Sauf que les consommateurs, eux, citent en priorité (34%) « des prix plus bas » comme principal axe d’amélioration des MDD, selon une étude Arcane Research. Loin devant l’innovation (13%). Quid du client qui cherche juste des spaghettis à moindre prix ou de la lessive en poudre basique ? Facteur aggravant de la sophistication, la répercussion sur l’image de l’enseigne. Des produits MDD trop chers ou trop segmentants dégradent la perception sur l’ensemble des prix du magasin.

3/ L’ambition sans les moyens

De plus, cette course en avant a un coût : « Ni l’industriel, ni le distributeur n’ont les moyens de déployer une vraie stratégie de marque face à des grands industriels qui ont des marges de 60% ! », soupirait Carlos Verkaeren, directeur général pour les biscuits Poult, dans une interview à LSA en 2012. Fabriquer une Ferrari au prix d’une Clio, voilà qui semble en effet compliqué. Il ne suffit d’ailleurs pas d’innover, encore faut-il le faire savoir. Et là aussi les marques nationales ont une vraie force de frappe. D’après Kantar Media, les grandes marques de PGC (alimentation, hygiène beauté, boissons et entretien) ont dépensé 6,3% de plus en 2015 en publicité par rapport à 2014. Le groupe Unilever a lui seul a englouti 277 millions d’euros en campagnes de pub. Impossible de rivaliser pour des MDD qui restent donc dans l’ombre médiatique.

4/ Des répercussions dangereuses sur les fournisseurs

Les petites entreprises, principales fournisseurs de MDD, souffrent. « De nombreuses PME françaises voient des pans de leur activité s’évaporer, sans compter l’appauvrissement des territoires, des emplois » s’inquiète la FEEF (Fédération des Entreprises et Entrepreneurs de France). On pourrait croire que les grandes marques n’ont plus qu’à se frotter les mains. Sauf que bon nombre d’entre elles sont aussi… fournisseurs de MDD.  Bonduelle vient par exemple d’annoncer la fermeture en juin de son usine de Russy Bémont dans l’Oise, dédiée justement aux légumes en conserves sous MDD. « La baisse des volumes commandés et celle des prix imposée par les distributeurs n’étaient plus tenables économiquement », déplore le groupe.

Seul Monoprix semble être à contre-courant. Le groupe a présenté en avril sa nouvelle gamme P’tit prix, avec des produits présentés dans du papier style kraft, une communication réduite au maximum et des prix réduits au maximum. Résultat : dans 90% des cas, les ventes de ces produits ont doublé, d’après des chiffres cités par Le Monde. Il est tout de même paradoxal de constater que c’est l’enseigne la plus « chic » qui montre la voie dans le retour aux sources…

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