Interview : Le bal des enseignes pour racheter Bio c’ Bon (2/3)

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Voilà maintenant plus d’un mois que Bio c’ Bon a été repris par le groupe Carrefour, suite à la décision du Tribunal de Commerce de Paris. Ce fut sans aucun doute un des temps forts de cette année 2020 côté retail tant il est rare qu’une entreprise en faillite aussi petite (150 millions de chiffre d’affaires environ) déchaîne autant les passions des plus grands acteurs du commerce.

A l’origine de la saga Bio c’ Bon, il y a Thierry Brissaud, un serial-entrepreneur aussi discret que décrié, qui ne s’était jamais exprimé dans les médias. En tant qu’ancien employé de Bio c’ Bon, j’ai souhaité vous faire découvrir la vision de ce personnage haut en couleurs, sans filtres.

Après une première partie dévoilée hier, Thierry Brissaud nous parle aujourd’hui des discussions sur la vente de Bio c’ Bon puis la période du dépôt de bilan .

Quand Bio c’ Bon était en dépôt de bilan, vous avez essayé de faire un plan de continuation, que s’est-il passé?

Thierry Brissaud : Au vu des sommes annoncées par Carrefour, le plan de continuation envisagé ne pouvait pas tenir la route. Carrefour a quand même investi 80 millions d’euros : 60 millions de cash et 20 millions de reprise d’engagements.

L’administrateur judiciaire nous a toujours dit : « si vous voulez faire un plan de continuation, affichez-moi que vous avez 30 millions pour le faire, et on pourra voir à ce moment là, mais ne venez pas me proposer un plan à 10 millions, ça ne marchera jamais, compte tenu de ce que Carrefour a fait. »

L’objectif de l’administrateur a toujours été de faire entrer un maximum d’argent et le meilleur moyen pour cela était de jouer la « carte cashflow ».

On a fait dégager 90 millions, ça veut dire que Bio c’ Bon était vraiment une belle boite !

Qu’avez-vous pensé de l’offre de Carrefour et du fait qu’ils aient repris Bio c’ Bon?

Quand quelqu’un met 80 millions d’euros (avec en plus une quinzaine de millions investis car ils n’ont pas repris tous les actifs), on peut imaginer ce que Bio c’ Bon aurait valu si nous n’avions pas été en dépôt de bilan. Tout le monde sait qu’une société vaut beaucoup moins cher en dépôt de bilan que quand elle est in bonis. Si aujourd’hui on a fait dégager 90 millions, ça veut dire que Bio c’ Bon était vraiment une belle boîte !

Carrefour avait proposé de nous racheter il y a trois ans

Dans ce cas, pourquoi ne pas avoir vendu plus tôt?

Carrefour avait proposé de nous racheter il y a trois ans, mais cela ne s’est pas fait car il y a eu un changement de gouvernance à ce moment là. Alexandre Bompard est arrivé, et la vente est tombée à l’eau.

Il y a toujours eu des rumeurs de rachat de grands acteurs de la distribution, c’était déjà trop tard quand vous avez souhaité vendre?

Il y a surtout eu le phénomène des gilets jaunes qui a déséquilibré la boîte, il ne faut jamais oublier ça ! Quand on est sur des tendances de +30% à surfaces égales et que d’un coup on passe à -5%, le delta de chiffre est insupportable, tout simplement.

Donc sans les gilets jaunes, la fin aurait été différente?

Sans les gilets jaunes, on n’en serait pas arrivé là, sous réserve à l’époque que l’on puisse continuer à ouvrir de nombreux magasins. Sinon, si nous n’avions pas pu ouvrir autant de magasins, on aurait dû virer la moitié du siège.

Je pense que Zouari aurait été meilleur pour Bio c’ Bon.

Qu’avez-vous pensé des autres offres de reprises déposées au Tribunal de Commerce? (famille Zouari, Biocoop…)

Zouari proposait peu pour payer le passif mais reprenait tout le monde, employés et magasins. Il s’engageait à investir 70 millions mais l’administrateur s’en fout des gens qui payent pour l’avenir, il préfère avoir des gens qui paient pour le passé.

Et Biocoop?

Ils ne reprenaient pas tout le monde, ils offraient moins… Toutes les offres autres que Carrefour et les Zouari n’étaient pas recevables.

A titre personnel, vous aviez une préférence?

Je pense que Zouari aurait été meilleur pour Bio c’ Bon. C’est un entrepreneur, il a montré qu’il savait gérer des réseaux de distribution importants. Il s’intéressait directement à son commerce, il avait des idées, il reprenait tout le monde… Et aujourd’hui, il a compris qu’il fallait y aller, comme le montre 2MX Organic.

D’ailleurs que pensez-vous de 2MX Organic?

Il s’est magnifiquement associé avec Xavier Niel, qui est un grand milliardaire, et avec Matthieu Pigasse qui est un grand débrouillard, capable de lever beaucoup d’argent.

Bravo à lui ! Je l’ai appelé et je lui ai dit « Moez, je te félicite ». En terme d’argent cela semble être bien parti, maintenant il faut trouver les cibles.

Rendez-vous demain pour découvrir la fin de cette interview inédite. Au programme : le futur du marché bio et les futurs projets de Thierry Brissaud.

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